Retour en Russie, cette fois pour le sommet des Leaders de l’Arctique, événement qui a eu lieu à Moscou à l’hôtel Kosmos, fin avril, alors que le temps se réchauffe. Globalement j’ai beaucoup aimé. Le problème du retour décalé du fait du volcan restera anecdotique. J’ai été grisé par la richesse culturelle Russe des premières nations autochtones. N’est-ce que de la poudre aux yeux, un feu d’artifice de quelques heures ou bien la véritable promesse de nouvelles aventures et de nouvelles découvertes. Le futur me le dira. J’ai pourtant eu la sensation fugitive mais réelle de faire un véritable pas en avant. La Russie ne m’est plus si étrangère, elle s’apprivoise, aussi brutale qu’elle puisse apparaitre au premier abord. Je me sens parfaitement à l’aise dans cet environnement qui m’offre même parfois des points d’ancrage solides lorsque je constate à quel point les premières nations russes ressemblent à mes clients canadiens.
Dans le Pavillon 69 du grand centre des expositions de Moscou je me suis émerveillé de la richesse de ces peuples et du potentiel de découvertes que cela représente. Comme le film Fenêtre sur Paris, j’ai pu me projeter dans un univers de froid, de lointaines contrées perdues, de chiens, de rennes, de tentes en peau de bête, de chants, de traditions, mais aussi et surtout de femmes à la beauté pure et fascinante. Il n’y a aucun doute, la beauté de ces jeunes femmes russophones des premiers peuples dépasse encore celle des top-modèles russes que je croise dans le métro moscovite. C’est une beauté calme, pure, parfaite. Un peu comme un ruisseau qui surgit de la terre au pied de la colline. Limpide et transparent, le regard de Maria de Yakoutie qui m’observe calmement avec une assurance toute asiatique. Foudroyant et dévastateur le regard de Tatiana de la région de Tchoukotka qui vit à Moscou depuis quelques années. Des femmes indiennes qui ont repris les critères de féminité de la femme Russe. Maria m’a davantage impressionné que Tatiana. Je me souviens d’une question que je lui ai posée et du fait qu’elle a mis pas loin de 5 minutes avant de me répondre, sans me regarder, tout en restant silencieuse et absorbée. Elle s’est levée au bout de longues secondes, est allée chercher un livre qu’elle m’a gentiment montré et elle m’a donné sa réponse. J’ai été captivé par sa manière de bouger et de vivre. J’ai passé quelques moments avec elle et son collègue alors qu’ils rangeaient leur stand à la fin de l’expo, Maria est respectueuse, c’est une véritable beauté, gentille et calme, une fenêtre ouverte vers des aventures extraordinaires. En la regardant, je voyais ses cheveux dans le vent, des tipis mongols, des prairies à l’infini et des chiens sauvages qui rôdent autour des tentes. Je la voyais sourire lorsque je lui racontais mes aventures au Nunavik. À plusieurs reprises j’ai ressenti des pulsions de désir pour cette femme et j’en ai ressenti une certaine honte du fait du décalage entre la force de mes sentiments et le calme de sa présence. Je la regardais à la dérobée lorsque son collègue Radion nous parlait d’histoire de Chaman et de lieux habités par des esprits qui avaient été profanés. Mon esprit était déjà bien présent sur les lieux, j’ai passé un superbe voyage de quelques heures avec eux. Maria a demandé notre numéro de tel et elle a indiqué qu’elle appuierait notre projet pour ses écoles itinérantes. Lorsque je l’ai photographiée, elle a raidi son corps et figé son regard dans une pose pleine de retenue et typiquement asiatique. J’ai pensé à Cochise qui ne voulait pas se faire photographié de peur qu’on lui vole son âme. Si j’avais pu, je serais parti avec elle et j’aurai tout plaqué…
La beauté sauvage des femmes russes m’a littéralement fait perdre la tête
Tatiana c’est le contraire de Maria. Pourtant l’une et l’autre sont belles dans des proportions comparablement démesurées. Tatiana c’est le profil typique de l’indienne aux cheveux noirs et longs, au regard magique avec des yeux noir ébène, d’un noir d’encre, plus profond que la nuit. Même dans la nuit, on voit la différence. J’ai pensé que c’était une sorte de trou noir qui vient aspirer les marins perdus qui croisent au large de ses cotes. Tatiana n’est ni calme, ni gentille, c’est une peste brutale et gâtée. C’est un requin aux dents acérés qui a perdu toute notion élémentaire de la simplicité de ses origines mais il y a dans son apparence physique des trésors qui renvoient inévitablement vers des paysages nordiques et purs. Je l’ai croisé lors de la soirée anniversaire de l’association de RAIPON qui réunit tous les premiers peuples de la Russie. Tatiana est venue vers moi, directement et elle m’a demandé si j’étais bien américain. Elle s’intéresse plus à Los Angeles qu’à la Russie et travaille pour une compagnie de Limousine à Moscou. Elle aime le fric et pense naïvement comme la plupart des russes que l’Amérique est un eldorado dans lequel on vit comme dans les pubs télé. Elle se fait draguer par tous les mecs qui passent à côté d’elle. Elle est terriblement belle, elle en profite c’est normal. Elle parle avec cette voix de tigresse sulfureuse complètement ridicule que les jolies filles russes emploient ici, une voix faussement douce et sirupeuse destiné à dissimuler la violence de leur pouvoir sur le sexe mâle, lequel ne peut être que faible à la vue de telles icones. Tatiana m’a dragué toute la soirée mais je ne comprends pas pourquoi. Nous avons dansé, je l’ai embrassé, touché, je n’en pouvais plus. Elle a envoyé chier les autres mecs pour se coller contre moi. Je me suis saoulé, elle aussi. J’ai passé une soirée fabuleuse, j’ai rencontré plein d’autochtones russes, même un chaman mais inévitablement je revenais vers elle. Puis la soirée s’est terminée un peu tristement vers 1 heure le matin, elle m’a ramené à mon hôtel. Je lui ai proposé de la revoir. Le lendemain je l’ai vu animer une rencontre d’élection, je lui ai parlé un peu mais ce n’était plus pareil, elle avait changé de costume, elle est devenue distante.
Elle était encore plus belle qu’avant, avec un habit indien sage et coloré, les cheveux lisses dans le dos. Cette fille n’a rien en commun avec moi mais je ne peux m’empêcher de penser à elle. Je lui ai écrit plusieurs fois, elle ne m’a pas répondu. J’ai dû commettre des erreurs ou plutôt je me suis comporté de manière adéquate. Je me suis respecté et je n’ai pas sombré dans le ridicule. Pourtant je me suis attaché à son corps, ses yeux et ses cheveux. Je peux encore sentir la chaleur de son corps. Tatiana est une sirène, une indienne en plastique, une coquille vide de sens mais pleine de charme. Elle s’offrira à une apparence plus qu’à une idée. Sommes-nous si différents l’un de l’autre. Elle rêve de Los Angeles et moi de Tchoukotka. Tatiana a probablement senti chez moi cette fascination qui lui répugne. Remarque bien que j’aurai aimé sombrer dans l’abime de ses yeux noirs, une nuit entière. Tatiana est belle, le reste a peu d’importance.
Aujourd’hui dans le métro de Moscou j’ai vu un couple s’embrasser et se serrer très fort l’un contre l’autre, comme s’ils se trouvaient au cœur d’une catastrophe et que de leur union dépendait leur vie. Tout autour les gens, seuls, paraissaient amorphes et éteints comme des êtres dépouillés de sentiments. Cette image que j’ai trouvée belle m’a donné un peu plus fortement encore l’envie de croire à l’amour, comme un état vivant, par opposition à l’état de mort affective des êtres seuls qui les entouraient. J’ai pensé à Maria, sans doute rentrée à Iakoutsk. Elle ne m’a pas sauté dessus, elle m’a observé, mais probablement avec beaucoup plus de maturité et d’intérêt que Tatiana. J’aimerais revoir Maria… Je suis dépité, mon cœur est resté à Moscou.